Comme chaque année, le dernier rendez-vous des vététistes normands a lieu à Lisieux. Un circuit passant dans le parc animalier du Cerza, dans la fameuse "fosse aux loups".
L'Enfer du Nord
N'étant pas monté sur un VTT depuis cette même course, il y a un an, je me lance sur cette terrible épreuve. La forme est en perdition, la pluie a inondé les chemins pendant trois semaines, et les organisateurs ont décidé de durcir la course, passant de 40 à 55 kilomètres, le tout pour 946m de dénivelé positive. Il n'en fallait pas plus pour vivre un petit calvaire. Récit d'un bain de boue.
Le récit de Vincent
Le mois de septembre ayant été mon plus gros mois de l'année, en terme de fond et d'intensité, j'avais de bonnes jambes jusqu'à la mi-octobre, sans trop forcer sur les sorties. Les courses ne faisant pas foison au calendrier Isère, j'avais perdu le rythme des hautes intensités, et je ne roulais guère plus de 2h30 lors de ma sortie hebdomadaire avec Gabriel. Toutefois, nonobstant ma force en baisse et, par corrélation, mon poids en hausse, je m'alignais au départ du raid Cerza. Une formule sympathique et très populaire chez moi, qui rassemble chaque année environ 2500 personnes le matin pour marcher ou faire un des trois parcours Vtt balisé par le Vélo Club de Lisieux.
L'après midi, plus d'une centaine de cyclistes se faufilent dans les chemins boueux pour en découdre. L'an dernier, je prenais une 34 ème place qui me satisfaisait parfaitement. Mon objectif cette année était donc de réaliser un top trente, tout en tentant de bien figurer dans la catégorie "Espoir".
Mais voilà, il y a un an, le terrain était sec, la course fut rapide, et certains s'étaient plain d'une course sans grandes difficultés. Entendu, les organisateurs rallongent le circuit de 15 kilomètres: "vous voulez du dur, vous en aurez". Hier soir, je pense que beaucoup se sont plain cette fois de la difficulté du parcours: j'avais plutôt 60 que 55 kilomètres au compteur, pas loin de 1000 mètres de dénivelé, le tout en 3h44. Bref, un marathon de boue, de montagnes russes (15 vraies bosses répertoriées)...
Ajoutez à cela la neige qui a gagné la Normandie Samedi...oui, de la neige, en Normandie. Oui je sais, c'est aussi étrange que d'attraper un rhume sur la cote d'azur, ou bien encore de contracter la malaria au pôle nord... La neige en Normandie, à 30 kilomètres de la mer, c'est comme si un puceau mourrait de la syphilis. C'est du même ordre.
Au sortir d'une mare au-dessus duquel il me plaisait, dans ma plus tendre enfance, à lire un bouquin en écoutant l'eau ruisseler sur les cailloux comme les doigts roulent sur le dos d'une femme
Au départ, je sais que la gestion de l’effort serait primordiale. Physiquement, je connais un gars de mon âge, 14ème l'an dernier, un gros moteur, et surtout spécialiste de VTT. Sur l'hippodrome de départ, il sort en tête, et moi, presque bon dernier.
Je ne m'affole jamais, ne monte jamais dans les recoins perdus de ma fréquence cardiaque. En effet, alors qu'un ou deux touristes gauchistes-écolos partaient la fleur au fusil, et que d'autres tarés d'extrême droite avaient comme une envie d’expulser leurs pédales loin d'eux, j'avançais paisiblement sur le modem de ma condition du moment ( oui je suis très fier de cette métaphore, je crois que je vais l'encadrer sur la porte de mes WC).
La première cote est infranchissable, (600 mètres à 35%) et je suis déjà couvert de boue. Les motos ouvreuses ne nous aident pas, en nous projetant des mares d'eau dans les chemins les plus humides. Après une chute sans gravités, je trouve mon rythme et arrive près de chez moi, où mon frère m'attend avec de quoi me ravitailler. Nous sommes au 30ème kilomètres, et je commence à me fatiguer. Un signaleur me signale que je suis en 32 ème place. Puis une ornière me fait tomber, et là, ma jambe droite se contracte: crampe. Abominable moment où l'on croit que la fin du monde est proche. Je demanderais presque à la mère de m’amputer à ce moment précis, tout en mordant le premier morceau de bois venu. Bref affreux. Je m'étire péniblement et repars. J'ai perdu 4 places dans l'affaire, cornegidouille.
Un hydratant naturel a l'efficacité redoutable
Au second passage dans mon village-le plus beau du monde-, dont le nom (Ouilly du Houley) roucoule aussi bien que le chant des oiseaux au matin (ce qui me change des toussotements de pigeons grenoblois), j'ai les jambes aussi raides que... j'ai les jambes raides. Cependant je ne suis pas le plus à plaindre. En effet près d'une vingtaine de participants ont déjà jeté l'éponge. Ma tactique de départ en douceur était payante, car j’aperçois au loin des corps qui se dandinent. Il faut dire qu'au fond de moi, l'âme d'Albert Einstein qui se cache difficilement sous le corps de Brad Pitt, a su étudier le parcours dans le plus grand détail. A l'arrivée sur l'hippodrome, je sprint pour l'honneur pour prendre une place, et me classe 33ème sur les 96 coureurs engagés (65 classés). Une épreuve marathon d'une rare difficulté. J'ai déjà envie de dormir en passant la ligne. Il se met à pleuvoir, et je quitte rapidement les lieux, car la douche sera salvatrice. Ce n'est que chez moi que je m’aperçois que je prend la 2ème place en Espoir (5 classés à l'arrivée).
Cette fois la saison se termine. On raccroche le vélo. Place à l'assemblé générale de TVS, chez le Per' Gras, qui se résume, d'après les propos recueillis par mes soins, à cette maxime: "monter à la Bastille pour voir qui a la plus bonne descente"...
Ah, c'est pas bien de dégueulacer les beaux maillots TVS ! En tout cas, question "bain de boue", t'es au top !
Vive les chemins creux normands
Très beau compte rendu, très belle boue aussi mais je préfère ne la voir qu'en photo !
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